Loi sur la criminalisation du viol et de la pédophilie : quelques observations
À l’entame, je voudrais dire que toute société humaine a besoin de lois pour sanctionner toutes sortes de transgressions, sinon c’est la loi du plus fort qui va régner. Toutefois, personne n’étant à l’abri d’une faute, l’élaboration d’une loi devrait être considérée comme une nécessité de régulation sociale mais pas comme la panacée ni comme une arme qu’on brandit contre un camp. La meilleure loi pénale est celle qu’on applique le moins car la privation de liberté n’est pas souhaitable et ne saurait être le principe.
De plus, pour celles et ceux qui ont « jubilé », il faut rappeler que d’une part, des pleurs peuvent s’en suivre quand l’auteur de tels actes est vous mêmes ou un de vos parents ou amis ou…l’adage dit qui rira bien rira le dernier. D’autre part, il vaut toujours mieux dire » heureusement que le malheur n’est pas arrivé ! » que » niaw, la peine est dure ! »
Punir le viol et la pédophilie constitue bien sûr une option justifiée au regard des terribles méfaits cachés et apparents qui sont associés à ces actes abominables. Et c’est ce que le code pénal sénégalais a fait depuis 1965. Dans ce code pénal, le viol était qualifié de délit et sanctionné entre autres, par un maximum de 5 ans de prison en correctionnel.
Il se trouve que depuis quelques années, il y aurait une recrudescence attestée par des statiques fiables ou non, je ne sais pas, d’actes de viol et de pédophilie. En effet, il peut y avoir un pic observé de ces actes pour quelques temps, ce qui ne veut pas dire qu’il y a une tendance à l’augmentation.
Il peut y avoir aussi une augmentation de cas jugés non pas parce qu’il y a augmentation de cas de viols et de pédophilie avérés mais d’accusations, qui peuvent être sanctionnées par la relaxe. Il faut faire attention à l’interprétation des statistiques au cas où elles sont disponibles, pour une période donnée, et fiables.
L’activisme d’associations de femmes de notre pays a influencé le gouvernement, il me semble, s’il n’y a pas d’autres facteurs qui ont joué, à corser la peine liée aux actes en question, pour la qualifier non plus de délit, mais de crime avec toutes les implications y afférentes. C’est ainsi que le présumé coupable de tels actes sera jugé en cour d’assises, en étant passible d’une peine d’au moins 10 ans et d’au plus 30 ans.
Ayant dit ce qui précède, je voudrais faire les observations suivantes :
Mieux vaut compter sur des opérations de prévention des actes en question que de croire que la sévérité de la peine est la panacée. La preuve, ces mêmes associations de femmes qui ont réclamé la criminalisation de ces actes militent en faveur de la décriminalisation de l’infanticide et de l’avortement médicalisé, différent de thérapeutique, vu que là c’est la femme qui décide et le personnel de santé doit l’y aider, à avorter même si sa vie n’est pas en danger. Et comme motif de cette revendication, on nous dit que les prisons de femmes condamnées pour infanticide sont pleines alors que le fléau n’est pas jugulé !
S’il n’y a pas homicide associé aux actes en question, j’ai tendance à penser que l’ancienne qualification de délit peut suffire comme peine. Ce qui pourrait éviter les contraintes liées au jugement en cour d’assises en termes de délai entre autres. Le syndrome de la loi Latif Gueye n’est pas à répéter selon nombre de juristes avec l’encombrement des prisons et des relaxes après des années de détention préventive. Toutefois, pour la pédophilie ou le viol d’une personne atteinte d’un handicap qui la rend particulièrement vulnérable, je suis favorable à la criminalisation.
Il est souhaitable à mon avis que les auteurs présumés des actes en question soient jugés par des magistrats professionnels vu la sensibilité de la question et notamment celles du consentement ou non, des preuves, de l’âge du présumé coupable et de la présumée victime, etc. C’est ainsi qu’on pourrait relaxer au moindre doute ou trouver des alternatives comme le bracelet électronique ou obliger la personne en cause à se présenter régulièrement à la police.
Considérant toujours la sensibilité de la question aussi bien pour la présumée victime que le présumé coupable, et leurs familles, il est tout à fait justifié à mon avis, d’appliquer la même peine au complice ou à la complice des auteurs de ces actes. De plus, on devrait avoir un article du genre « l’auteur (e) de fausses accusations de viol ou de pédophilie ou de harcèlement sexuel est puni de la même peine que l’auteur du même crime ». Cela est nécessaire en rapport avec les fausses accusations.
Pour finir, il est souhaitable de revoir le problème du consentement pour une personne mineure. La minorité ne vaut pas automatiquement absence de consentement à l’acte sexuel. Il faudrait voir au cas par cas. Si des enquêtes disent que les filles ont une activité sexuelle de plus en plus précocement, et qu’elles sollicitent les services de santé pour disposer de contraceptifs, y a pas de raison de les considérer comme non consentantes parce que mineures.
C’est notre modèle de famille et de morale sexuelle qui est en train de se fragiliser et ce n’est pas la judiciarisation et la criminalisation qui seront la solution miracle. Si on y prend garde, si les enseignements de l’islam ne reçoivent pas l’attention qu’ils méritent dans notre pays, si on laisse l’agenda féministe monter en puissance par le levier de la loi et du droit, il faudra craindre des changements sociétaux très dommageables à notre société.
Oui, pour des transformations encadrées avec l’islam comme source de normes et de limites et non à la déstructuration de notre société.