vendredi 29 mars 2024
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Ouattara et la faille constitutionnelle du troisième mandat qui pourrait inspirer Macky Sall (Par Amadou BA)

Le Président ivoirien Alassane Ouattara, s’apprête à déclencher une grave crise politique en Côte d’Ivoire, en estimant à la veille de la fin de son dernier mandat, que le référendum de 2016 l’autorise à briguer deux mandats supplémentaires, car ces deux mandats précédents n’étaient pas concernés par la révision constitutionnelle.

En effet, la nouvelle constitution ivoirienne adoptée par référendum en 2016 stipule que :

Article 55: « Le Président de la République est élu pour cinq ans au suffrage universel direct. Il n’est rééligible qu’une fois ».

Ouattara estime, que son mandat précédent et celui en cours, ne sont aucunement concernés par la nouvelle constitution. Par conséquent, il a droit encore à deux mandats supplémentaires.

Cette hérésie juridique est en flagrante contradiction avec le Titre 16 sur les Dispositions Transitoires qui, en son Article 183, stipule clairement : « La législation actuellement en vigueur en Côte d’Ivoire reste applicable, sauf l’intervention de textes nouveaux, en ce qu’elle n’a rien de contraire à la présente Constitution ».

Autrement dit, la loi ne disposant que pour l’avenir, la législation en vigueur aant l’entrée en vigueur du référendum sur la limitation des mandats présidentiels, continue de régir le précédent mandat et celui en cours de Ouattara.

En définitive, cette nouvelle disposition de l’article 55 concerne la prochaine élection présidentielle, mais n’a jamais voulu faire table rase des mandats précédents de Ouattara pour l’autoriser à en briguer deux de nouveau.

Nous sommes malheureusement dans la même situation au Sénégal. L’Avis du Conseil constitutionnel sur le référendum de 2016 entretient l’équivoque absolu sur le troisième mandat. Le conseil constitutionnel a estimé que :  » la disposition transitoire prévue à l’article 27 dans la rédaction que lui donne l’article 6 du projet et aux termes de laquelle, « Cette disposition s’applique au mandat en cours » doit être supprimée ; elle n’est conforme ni à l’esprit de la Constitution, ni à la pratique constitutionnelle, la loi nouvelle sur la durée du mandat du Président de la République ne pouvant s’appliquer au mandat en cours ».

Si on en fait une lecture restrictive de cet Avis, cela signifie que le nouvel article 27 de la constitution issu du référendum et qui dispose que : « La durée du mandat du Président de la République est de 5 ans. Nul ne peut exercer plus de deux mandats successifs », ne s’applique pas au premier mandat de Macky. En effet, d’après le Conseil constitutionnel, le référendum et les modifications sur la durée du mandat présidentiel : « ne s’applique pas au mandat en cours ».
Il y a une faille réelle que Macky pourrait utiliser pour estimer que le référendum qui parle de mandat de 5 ans, ne prend pas en compte son premier mandat de 7 ans ; que par conséquent, son nouveau mandat de 5 ans correspond en réalité à son premier mandat d’après le référendum.

Dans tous les cas, il y a une étrange surchauffe des tentatives de modification de la durée du mandat présidentiel dans tous les pays sous influence française (Togo, Côte d’Ivoire, Guinée, Sénégal, Mali, Tchad), et ce, dans le contexte de découverte d’hydrocarbures, de nouvelle monnaie et de zone de libre échange.

On voit toute la turpitude des Présidents Africains, qui pour la plupart conseillés par des constitutionnalistes français, insèrent lors des référendum, des dispositions sibyllines pour, en connivence avec le Conseil constitutionnel, rester au pouvoir de façon indéfinie.

Il faut que Macky Sall lève cette ambiguïté de façon définitive au lieu de louvoyer comme Ouattara et en usant de formules ésotériques et volontairement équivoques.

Amadou BA

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