Cet article est une déclaration d’impôts… sur les sentiments fiscaux
Le fisc français, un marabout qui parle clair
En France, déclarer ses impôts, c’est comme consulter un marabout avec un grigri infaillible : tout est écrit, tout est clair. Le prélèvement à la source ? Une magie moderne. L’employeur envoie une pré-déclaration propre comme un bon petit déjeuner au lit. On ajuste les charges, on ajoute des frais réels, les dons à l’association du quartier, voire les croquettes du chat diabétique de la tante (si on est téméraire). Et parfois, paf ! Une ristourne tombe, comme un bouquet de fleurs pour la fête des grands-mères. Mais surtout, on déclare. Toujours. Même sans rien devoir. Par civisme, par habitude, ou parce que Bercy veille, tel un ex amoureux obsessionnel : « Pense à déclarer tes revenus, chéri. Même si tu n’as rien à cacher. » Résultat ? Un avis d’imposition net, carré, dans la boîte aux lettres. Le citoyen sait ce qu’il donne. Il peut donc exiger des écoles, des lampadaires, ou au moins un hôpital où le paracétamol ne se vend pas au marché noir.
Sénégal : l’amour fiscal à l’aveugle
Puis je me souviens du Sénégal. Terre des manguiers généreux, du café Touba qui réveille les morts… et des prélèvements opaques. Ici, l’impôt est un roman sans pages. Mon employeur verse mes taxes religieusement. Mais moi, contribuable ? Aucun reçu, aucun SMS, pas même un griot fiscal pour m’annoncer : « Cette année, vous avez financé trois nids-de-poule et un député en voyage à Dubaï. » Le système ? Un couloir sombre où l’État vous chuchote : « Donne, et ne pose pas de questions. » Pas de déclaration, pas de déductions expliquées, pas de « Merci, voici votre facture ».
Diallo Bitik et le vieux Diatta : les oubliés du fisc
Diallo Bitik, vendeur de soblé et de pains, ignore que le mot « impôt » existe en wolof. Le vieux Diatta, paysan diola de Tobor, croit que la TVA est une maladie des chèvres. Pourtant, Diallo paie des taxes sur ses allumettes importées. Le vieux Diatta contribue via la patente de son fils, chauffeur de camion. Mais personne ne leur explique que ces prélèvements pourraient payer le goudron devant la boutique de Diallo, ou l’engrais subventionné pour les champs du vieux Diatta. Pour eux, l’impôt, c’est un fantôme. Ils paient sans le savoir, subissent sans comprendre. Et l’État ? Il joue les mariés timides : il prend, mais n’ose pas avouer son amour.
La contrepartie ? On l’attend sous le manguier
Pourtant, l’impôt devrait être une tontine collective. Si je donne, j’ai droit au bulletin ! Pourquoi ne pas m’envoyer, sous mon manguier à Ziguinchor, un courrier façon : « Cher citoyen, vos X F CFA ont financé : 2 lampadaires (un fonctionne). 1 séminaire sur l’emploi des jeunes (buffet compris). 1 mission au Canada pour étudier… les poubelles intelligentes (oui, ça existe). » Je ne demande pas un poème, mais un reçu, un sourire fiscal, un début de transparence. Sans devoir jouer les Selbé Ndom dans mon bulletin de paie.
Sensibiliser l’informel : et si le fisc s’adaptait à nos réalités ?
Pour séduire Diallo Bitik et le vieux Diatta, il faut des méthodes audacieuses : Des spots radio en langues locales : « Payez vos impôts, demain le marché aura… bon, peut-être un banc. » La campagne Un reçu, un café Touba : tu déclares, on t’offre la dose de caféine citoyenne. Et pourquoi pas une journée portes ouvertes des impôts avec des beignets dougoub ?
Conclusion : marions le fisc et le citoyen !
En France, même quand l’impôt pique, on te fait croire que c’est toi le héros. Au Sénégal, c’est la relation toxique : on prélève, mais on ne s’engage pas. Message au fisc sénégalais : Envoyez des reçus. Des infographies colorées. Un numéro vert pour les questions existentielles (« Puis-je déduire le hadiya de mon marabout ? »). Et surtout, parlez à Diallo Bitik et au vieux Diatta. Leur ignorance est votre échec. Leur adhésion sera votre victoire. Rappelez-leur qu’un impôt transparent, c’est comme un bon bol de tiep : ça se savoure mieux quand on sait ce qu’il y a dedans.
Signé : Thierno DIALLO, Un contribuable qui paie ses impôts… enfin, je crois.
PS : Si cet article vous a plu, merci de déclarer 10 % de rire en nature à l’État. Un reçu vous sera envoyé… ou pas