lundi 29 avril 2024
Contributions

Le Sénégal serait-il au faubourg des réalités du Covid-19 ? [Partie 2]

Ousseynou Tamba est un étudiant en master à la section anglaise de l’université Gaston Berger de Saint Louis. Spécialisé en Littérature et Civilisation du Monde Anglophone, il analyse, ici, la façon dont les sénégalais ont vécu et vivent encore l’épidémie du Covid-19 depuis quelques semaines. À cette occasion, il jette un regard critique sur la gestion de l’épidémie par les autorités gouvernementales du Sénégal.

Application à outrance

En outre dans le cadre de sa mission de l’application stricto sensu du couvre-feu, les prémices de l’état d’urgence ont donné lieu à des scènes de chicotes, de bastonnades et d’humiliation. Des policiers ont usé de moyens disproportionnés sous prétexte de lutter contre la Covid-19. Des scènes hallucinantes et indignes n’honorant pas la tunique portée. Cependant, sans aucune forme de questionnements ou de renseignements préalables sur la nature de la sortie, certains ont reçus des flagellations à tort comme si certaines urgences ne nécessitent pas parfois des déplacements nocturnes, à ceux-là s’ajoute le manque de moyens de transports. Ignorant aussi les gestes barrières, certains se sont vus entasser dans des pickups avant d’être incarcérer dans les prisons en présence d’autres taulards, méconnaissant réellement une possibilité de transmission pathologique externe.

 Le lendemain, une phobie totale s’empara de la capitale. Chacun s’empresse de rentrer chez lui pour éviter le risque de se faire fouetter par les forces de l’ordre. Et parmi eux nos chers « Xoslumans » . Une vidéo montre de vaillants citoyens finir le travail 2 heures avant le couvre-feu, s’offrant à un marathon sur le trottoir pour arriver à destination avant le couvre-feu. D’autre part, nous assistons à des chaines interminables de files d’attente qui se bousculent auprès des bus TATA peinant à respecter la distanciation physique, exposant à un haut risque de contamination. C’est là que la police a sévit. La nuit tombée la population de Médina touchée dans son égo décide de défier les forces de l’ordre pour abus de pouvoir et les brutalités qu’ils ont subies la veille. Il faut aussi noter que trop d’agressivité crée la révolte. Les populations de Médina et certains policiers emportés par les évènements avaient perdu de vue le véritable ennemi. Ces scènes auraient été dignes d’une autre époque mais pas en période de guerre déclarée contre une pandémie qui requiert de la part de tout le monde une lucidité absolue et une sérénité totale. Car il serait aberrant de pulluler les hôpitaux de victimes de bavures policières que du virus de Wuhan.




Décisions incongrues

Pendant ce temps, le Gouvernement avec ses décisions incongrues engendre une querelle médiatique continue, liée à la maladie et au plan de riposte. Tout se passe, comme si le virus à partir 20h se lève, se balade dans les rues vides, fait ses besoins, s’épuise et part se coucher à 06h, laissant les gens libres durant la journée. En d’autre termes, laisse les gens se lever, prendre le bus, le taxi et l’autocar pour aller dans les bureaux, les marchés et services à l’exception des endroits comme la mosquée, l’église et les terrains de foot pour n’opérer que la nuit. A cela, s’ajoute la politique de la distanciation sociale qui ne s’applique guère aux personnalités et richards à l’image du ministre de la culture qui se déambule d’une maison d’artiste à une autre, prétextant être dans l’exercice de sa fonction. Les plateaux de télés et émissions qui se succèdent accueillant invités de divers horizons jusqu’à une heure tardive prétextant que la distanciation sociale est respectée tout en confondant distanciation physique et distanciation sociale. Les fils et filles de Richards aux Cités Almadies se permettent de s’offrir des soirées privées où la drogue coule à flot attestant de l’inégalité entre les riches et les pauvres dans le respect des mesures barrières. Le riche semble avoir droit à un traitement de faveur pendant que le simple citoyen a droit à des chicotes et tabasses. La loi n’est point en faveur des Badoolas [1].

Une semaine après le coup d’envoi donné par le commandant en chef, pour la distribution des vivres sur l’étendue du territoire, dans le cadre du programme de riposte Force Covid-19, des organes de presse font états d’irrégularités et de magouilles dans l’attribution de ces vivres en ces temps de disette. Les réseaux sociaux y nomment certains hommes d’affaires et célébrités, tous acteurs de « deals ». Deux entreprises Libanais (AvantiSuarl et Afri&coSuarl), à elles seules, empochent une somme de 18 milliards de Francs CFA au détriment des firmes locales. Entre patriotisme économique hérissé et xénophobie décomplexée, difficile de trancher sur la véritable raison de ce choix indigne de nos autorités. Des tâtonnements, explications farfelues et incohérentes imbibées de nervosité flagrante au compte rendu face à la presse, témoignent d’une distribution mais surtout pas d’une transparence optimale. C’est dans ces entre faits que le ministre Mansour Faye menace de porter plainte suite à une question posée à ce sujet par un journaliste. Le Président est glorifié avec une médiatisation en pompe pour la distribution des denrées qui viennent du peuple et retournent au peuple. Chacun tire vers sa propre personne. Fait tout à fait normal, quand on tient compte des hommes politiques que nous avons et non des hommes d’Etat.

Ousseynou Tamba
Étudiant en Master à l’université Gaston Berger de Saint-Louis, spécialisé en Littérature et Civilisation du Monde Anglophone

[1] Dans ce contexte le mot wolof Badoolas fais référence aux pauvres et démunis




0 0 votes
Évaluation de l'article
S’abonner
Notification pour
guest

0 Commentaires
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x