Le secteur informel et TPE/PME face au COVID-19: agir pour contenir la pandémie et sauvegarder l’activité économique
L’année 2019 a été marquée par un ralentissement des échanges internationaux qui ont été fortement pénalisés par la guerre commerciale sino-américaine. Quant à l’année 2020, elle s’annonce catastrophique, avec un début de trimestre marqué par une crise sanitaire d’une ampleur internationale.
Les mesures de confinement liées à la pandémie mondiale du Covid-19 produisent un choc aussi bien au niveau de la demande que de l’offre. Les plans de soutien massifs à l’économie se multiplient dans les pays touchés, pour réduire l’impact de la crise sanitaire qui aura forcément des conséquences.
Le Sénégal n’est pas épargné et voit le nombre de cas positifs au Covid-19 augmenter de jour en jour.
Le secteur informel sénégalais qui représente 41,6% du PIB et qui emploie environ 48,8% de la population active occupée selon la DPEE (Direction de la Prévision et des Études Économiques), est fortement impacté par les mesures prises par l’État pour endiguer la propagation du virus. Les acteurs de ce secteur ont un besoin vital de continuer leur activité ; en effet, pour une grande partie d’entre eux, la dépense quotidienne repose sur la recette du jour.
Sans une aide appuyée de l’État, de nombreuses familles risquent de se retrouver dans l’impasse : « Mourir de faim ou mourir du Covid-19 ». Partant de ce constat, une question demeure inconnue : quand et comment, le fonds de riposte et de solidarité lancé par l’État, va leur être alloués, sachant que le secteur informel est hors cadre réglementaire ?
Dans le contexte d’urgence, nous nous intéressons particulièrement aux acteurs du secteur informel semi-structuré, autrement dit, ceux qui sont identifiables par leur contribution à l’effort collectif de paiement des impôts locaux.
Covid 19, Impacts sur le secteur informel
Face à la crise, la première des difficultés est de mesurer ou chiffrer l’impact réel sur le secteur informel, mais aussi d’identifier tous les acteurs nécessiteux de l’aide de l’État. Parmi les difficultés économiques rencontrées par les acteurs du secteur, figure une perte nette de revenus des travailleurs du secteur informel, liée à la fermeture des marchés hebdomadaires et quotidiens. La fermeture anticipée des marchés à cause du couvre-feu engendre une forte baisse de chiffre d’affaires des commerçants.
De plus, la limitation, voire l’interdiction de mobilité géographique, freine l’approvisionnement de marchandises entre Dakar et le reste du pays. Cette situation risque de créer une pénurie des denrées à moyen terme.
Venir en aide au secteur informel
Pour venir en aide au secteur informel particulièrement vulnérable et directement touché par la crise, l’État doit allouer une partie des 1000 milliards « du force Covid-19 » à ses acteurs. Ils pourront être identifiés par des justificatifs comme : bail commercial, quittances patentes, taxes professionnelles, identification dans le registre des mairies ou collectivités territoriales etc.
Les autorités doivent également prendre des mesures pour faciliter la mobilité des clients et des commerçants entre 6 heures du matin et 17 heures, afin de limiter la baisse de chiffre d’affaires liée à la fermeture anticipée des marchés. Cela passe aussi par l’ouverture encadrée des marchés hebdomadaires, comme cela se fait dans certains pays, en prenant des dispositions de sécurité et de respect des mesures préventives. L’État devra s’appuyer dans cette démarche, sur les collectivités territoriales ; notamment les mairies qui ont un rôle à jouer dans la réglementation et la structuration des marchés, mais aussi pour mieux identifier les acteurs du secteur pouvant prétendre à une aide.
L’État doit prendre des mesures fortes, comme le remboursement des taxes professionnelles et patentes payées en mars et la suspension des taxes à venir, ou impôts locaux, supportés par le secteur informel, jusqu’à un retour à la normale.
Quid des PME/TPE ?
La fermeture des frontières a fortement limité l’approvisionnement de nos entreprises en matières premières. Une baisse de leur chiffre d’affaires liée aux difficultés à l’exportation, à une baisse du pouvoir d’achat et un chômage technique accéléré, est à prévoir.
Des difficultés seront également à noter pour les TPE/PME dans la gestion de leur trésorerie, impactée par la forte baisse de l’activité et des commandes (produits de consommation), mais aussi pour faire face au paiement des charges, notamment salariales.
Protéger les PME/TPE
Pour éviter que cette crise sanitaire ne mette en grand danger es entreprises déjà fragilisées par une concurrence mondiale accrue, il est nécessaire d’élaborer rapidement une Loi de Finances rectificative en fonction des différentes prévisions. Il faut reporter les échéances sociales et/ou fiscales pendant au moins 6 mois et mettre en place des systèmes de remise d’impôts directs (IMF, IS, CGU, …). L’État providence doit jouer pleinement son rôle et garantir à hauteur de 90% des prêts de trésorerie pour les PME/TPE par le biais du fonds « Force Covid-19 ».
Les établissements financiers doivent également jouer leur partition en favorisant la suspension ou le report des échéances de crédits professionnels sur 6 mois.
Adopter des mesures préventives
Pour aider le secteur informel à lutter contre le Covid-19, il est nécessaire que l’État mette à disposition de ces acteurs du matériel de protection (masques, gants, gels hydroalcooliques, etc.)
Certains professionnels de l’informel, comme les artisans tailleurs par exemple, peuvent être mobilisés pour la confection de masques réutilisables, en respectant les normes recommandées. Ces masques devront être commandés par l’État et distribués gratuitement aux citoyens.
Il faut donner à la police et aux ASP les moyens de leur action, mais aussi, la prérogative de veiller au respect des gestes barrières dans les marchés, y compris les marchés hebdomadaires qui seront autorisés à ouvrir.
Pour aider les populations à respecter les gestes barrières, il est impératif d’approvisionner ces marchés d’eau, de gels hydroalcooliques, ou à défaut, de savons pour permettre aux clients et aux commerçants de pouvoir se laver régulièrement les mains. Pour limiter les contacts, une réorganisation des marchés est indispensable, de manière à faire respecter les mesures de distanciation pour préserver au mieux les populations.
Panser la pandémie et penser à l’après Covid 19
La pandémie qui sévit dans le monde et qui touche notamment les grandes puissances n’a pas épargné le Sénégal. Face à une possible expansion, nous devons être prêts à faire face, anticiper et agir pour limiter la casse.
Ce bouleversement inattendu auquel le monde fait face doit nous pousser à repenser notre modèle sanitaire, économique et social, qui a montré ses limites.
L’urgence actuelle est de mener une grande réflexion rapide conduisant à des décisions sérieuses permettant de limiter les dégâts mais aussi de penser à l’après Covid-19.
Bravo au MONCAP France pour le dynamisme et la pertinence de l’analyse et des solutions préconisées !