Jeudi Noir N°85 : Exploitation du pétrole – Pour les assises de la pêche
En Afrique on nous a appris à considérer les rêves comme des messages pour l’avenir… j’ai fait un rêve… une eau calme mais puissante qui enserre le plateau, déboule du boulevard de la République, se dirige vers la corniche et moi, médusé, me demandant si la solution était la fuite à pied ou monter sur un immeuble… une histoire à… dormir debout sans doute. L’histoire nous en dira peut-être plus.
En tout cas nos eaux poissonneuses qui génèrent plus de 240 milliards de FCA à l’export elles, ne font pas vivre ceux qui sont censés les exploiter. Comment comprendre que les statistiques établissent le chiffre global et immuable de 600 000 emplois ( directs et indirects) depuis Senghor ? La population de pêcheurs n’évolue t-elle pas ou est ce un manque de considération par la tutelle ? Que les Ministres successifs n’aient jamais été du sérail ne justifie tout de même pas un tel laxisme ! Les salaires des fonctionnaires en charge du secteur posent aussi problème, pourtant le gouvernement généreux avec l’argent des privés a fait augmenter les salaires (du privé). Un ingénieur de la pêche est à moins de 300 000 francs et un Chef de poste de contrôle et de surveillance à 150 000 francs mensuels ! Autant dire qu’il leur faut chaque jour une dose extraordinaire de patriotisme pour arraisonner les bateaux pratiquant la pêche INN (illégale).
En 2018 et début 2019, sur sept bateaux chinois arraisonnés, pas de sanction connue, il y a un mois à Fass boye un bateau arraisonné n’a toujours pas fait l’objet de sanctions officielles. …Pourtant ce sont eux les damnés de la fonction publique, ces braves fonctionnaires qui ont risqué leur vie pour les prendre. Pourquoi aucune sanction officielle ? Pourquoi pas de primes d’efficacité à l’instar des agents du fisc ou des douanes ?
Il est impératif d’aller vers des Assises de la Pêche pour tirer au clair les nombreuses zones d’ombre…que n’a-t-on pas dit sous khoureichi puis Oumar Gueye et même avant ? Quand le pêcheur sénégalais pourra-t-il espérer avoir un secteur organisé ? En tout cas, l’arrivée du pétrole off shore se présente maintenant comme une nouvelle menace sérieuse pour eux. Woodside, Cairn Energy, Far Ltd et Petrosen viennent cette semaine de lancer la phase 1 du projet du champ pétrolier de Sangomar au large du delta du saloum avec des ordres de service pour la mise en place de la plateforme et la réalisation du forage. Ce sera 100 000 barils par jour dès 2023 ! Deux jours seulement après cette annonce, le Président nomme (précipitamment ?) deux DG pour deux sociétés anonymes issues du « démantèlement » de Petrosen ! Tiens, tiens… pourtant il y avait des plaintes dans les tiroirs et un rapport explosif établi par l’IGE, impliquant cette désormais ex Petrosen !
Au fait qui sont les actionnaires de ces nouvelles sociétés qui salivent déjà sur le contrat de partage ? Certes le PR a les prérogatives des nominations mais a-t-on fait attention à la « mobilité exceptionnelle » de l’un des DG nommés ? Passage furtif à Elton et plusieurs pérégrinations courtes pour atterrir ici. Comment gérer des questions de futur avec une vision de court terme ? Je me pose la question. Mais une plus grande encore, de question: A t-on fait une étude d’impact environnemental (EIE) relative à l’exploitation du pétrole off shore ? En tout cas les acteurs de la pêche ne l’ont pas vue, ce qui constitue une anomalie de procédure. Si vous la trouvez, dites le moi s’il vous plait. Cette EIE doit permettre de donner des orientations en matière de prévention et de contrôle pour contraindre l’exploitant à des dispositions maximisant la sécurité de fonctionnement.
Le Ghana en a fait les frais: exclusion de pêche sur 500 m autour des puits, odeurs nauséabondes, bruit, algues parasites et surtout grande mortalité des poissons puis au finish importation de poissons du Sénégal entre autres.
Voilà ce qui nous pend au nez si le COS ne prend pas les devants. Le SNTP réclame, lui un Forum sur ces questions. 25 millions, pour le tenir, ce n’est pas la mer à boire. Mais voilà qu’aujourd’hui même, à Thiaroye, le chef de poste du service de pêche a fait une découverte inquiétante : du liquide noir à l’odeur d’essence provenant d’une « source » à même la plage ! Risque majeur dites vous ? Ajoutez-y imminent. Espérons que l’on nous éclairera sur les véritables raisons de cette découverte pétrolière sur une plage de pêcheurs.
Le plus dur est qu’en matière de pétrole c’est pire que les finances : on privatise absolument les profits et transfère totalement les mauvais coups. Plus que jamais il nous faut une gouvernance vertueuse, patriotique et responsable AVANT l’exploitation pétrolière. Il sera tout aussi nécessaire d’exiger des comptes de nos dirigeants devant l’immensité de leurs responsabilités pour l’avenir.