dimanche 1 décembre 2024
Contributions

Déni et mépris face à la colère du peuple

Résister ou disparaître, sont les issues possibles face à une dictature qui balaie tout sur son passage, pire que l’ouragan Katrina.
Gare à ceux qui s’opposent !

Une énième forfaiture de Macky Sall et son gouvernement que le peuple refuse de digérer, et un président et son gouvernement qui n’ont d’autre ambition que de « Réduire l’opposition à sa plus simple expression ». Peu importe la manière, la fin justifie les moyens.

Monsieur le président-roi, cette fois-ci votre baguette mackyiavélique n’aura pas fait les effets escomptés, car seul le peuple est souverain. Ce peuple épris de justice a su reprendre ses droits pour ainsi dire que le Sénégal n’est pas une propriété privée, ni moins une entreprise familiale.

Monsieur le président-roi depuis votre arrivée au pouvoir en 2012, vous avez fait rétrograder notre démocratie trente ans voire quarante ans en arrière, comme si ceux qui ont perdu la vie en luttant pour la sauvegarde de la démocratie sont partis en vain, quelle amnésie !

Comment en sommes-nous arrivés là ?

L’adage qui dit « on n’arrête pas la mer avec les bras » trouve tout son sens dans la situation socio-politique actuelle du Sénégal, la volonté populaire face à l’injustice d’un clan mafieux et stratège.
La cabale ou le complot qui a abouti à l’arrestation du président Ousmane Sonko, a été la goutte d’eau qui a fait déborder le vase, d’autres me diront que le Rubicon a été franchi.

Cette crise alliant mal être et colère populaire, est beaucoup plus profonde qu’elle n’y paraît.

On vit une réelle crise sociale, au-delà d’une crise politique, économique et sanitaire, ceci dit une crise peut toujours en cacher une autre. Ainsi peut-on dire que le Sénégal souffre de plusieurs maux, notre pays est malade, notre pays va mal.

Ne réduisons pas ces émeutes et soulèvement populaire menés en particulier, par cette jeunesse tant désireuse d’un avenir meilleur, à une cause purement politique. Le saccage, le pillage des supermarchés et de certains édifices étrangers ou nationaux, sont l’expression d’une souffrance profonde et d’une pauvreté jusque-là occultée, sous prétexte d’une paix sociale « Sénégal deukkou Jamm la »*. Ce refrain tant vanté par des privilégiés égoïstes ou pseudo-élites pires que des gourous qui sont sous l’emprise de la cupidité et de l’opulence que leur offre le pouvoir.
L’état déroule le tapis rouge aux entreprises étrangères en particulier celles françaises qui ont une présence trop pesante, au détriment de nos petits commerces phagocytés par ces géants du commerce, créant par conséquent un déséquilibre commercial et une croissance économique biaisée.

Le secteur informel principal axe névralgique de notre économie et englobant plus de 90% des travailleurs, est mis à rude épreuve face à la crise sanitaire. Ces acteurs de l’informel communément appelés des goorgorlous* sont les principaux oubliés du programme de résilience initié par l’état pour un budget de 1000 milliards collectés auprès des particuliers et professionnels. Une stratégie de résilience catastrophique tant par la gestion que par l’utilisation de ces fonds de riposte face au COVID, et qui a été source de polémique, d’un manque de transparence et de traçabilité.
Comme si cela ne suffisait pas l’état prend des mesures de lutte contre le COVID inefficaces, inadaptées, qui plongent le secteur informel dans un coma profond alors qu’il était déjà sous assistance respiratoire.

A ceux qui se posent la question : « Comment fallait-il s’y prendre pour un secteur informel désorganisé et hors cadre réglementaire » ?

Je vous renvoie aux propositions de la commission Commerce, Entrepreneuriat et PME de MONCAP France : Secteur informel et TPE&PME face COVID-19 publié dans Jotnanews en date du 08/04/2020. Cette résilience s’est traduite à une défiance populaire due à un chômage de masse des jeunes, sans perspectives d’avenir et désorientés, qui trouvent pour la plupart du temps comme salut « Barça ou barsakh »*.

Cette fois-ci au lieu de mourir en mer en prenant les pirogues, ils ont voulu résister, riposter, lutter, braver les interdits et faire face à ce système mafieux quitte à mourir en martyrs.
Une dictature à la place de la démocratie et une médiocratie pour ne pas dire idiocratie à la place de la méritocratie.

Le peuple Sénégalais sait prendre son destin en main, quand il s’agit d’abus de pouvoir et quand il est au pied du mur. L’alternance de l’année 2000 en est une parfaite illustration et celle de 2012 une confirmation.

Les alternances successives connues jusque-là n’ont donné lieu à aucun changement, dans la vie des sénégalais, si ce n’est les enfoncer davantage dans la pauvreté. La vraie alternance est l’alternative, un changement de système progressif, d’une vraie indépendance, d’une justice sociale et par-dessus de tout une souveraineté nationale : souveraineté alimentaire, souveraineté monétaire, souveraineté politique, souveraineté économique, … souveraineté tout simplement.

Vive un Sénégal souverain, vive une Afrique souveraine !

Dans un pays où c’est la violation du principe de séparation des pouvoirs, autrement dit tous les pouvoirs sont concentrés aux mains d’une seule personne en l’occurrence le président-roi, sans un peu lucidité de celui-ci, le pouvoir se transforme en dictature. Dans une telle dérive et abus de pouvoir, seule la lutte libère. Ainsi disait Mandela « Être libre, ce n’est pas seulement se débarrasser de ses chaînes ; c’est vivre d’une façon qui respecte et renforce la liberté des autres ».

Le vrai pouvoir est dans la rue et le peuple l’a encore démontré bien mieux qu’en date du 23 Juin 2011. On a assisté à des jours d’émeute aux conséquences désastreuses, avec des pertes de vies humaines bien plus que regrettables, mais des martyrs à nos yeux car ils se sont sacrifiés pour la démocratie et une justice indépendante.

Hélas, il aura fallu qu’on en arrive là pour que le président-roi sorte de son manoir pour enfin ne rien dire, si ce n’est « je vous ai compris ». Face à cette omerta politico-judiciaire et un soulèvement populaire sans précédent son silence était devenu trop pesant voire méprisant. Le maître de la diabolisation a tout mis sur le compte du COVID, heureusement que celui-ci a bon dos.

Quel déni face à une situation catastrophique, un ras-le-bol général, des scènes de chaos et d’émeutes urbaines inédits dans l’histoire politique du Sénégal !

Quel mépris face à un peuple qui est au bord du gouffre, et sans perspectives d’avenir mais qui exprime sa volonté de changement et qui porte un espoir en la personne du président Ousmane Sonko.

Quelles leçons en tirer pour le parti Pastef et les conséquences sur le plan politique ?

Faut-il voir le verre à moitié vide ou à moitié plein ?

D’une part le parti Pastef a une épée de Damoclès suspendue au-dessus de sa tête avec les chefs d’inculpation, toujours maintenus sur son leader et les nombreux prisonniers politiques non encore libérés. D’autre part, le parti peut se targuer d’avoir fait trembler le pouvoir qui a été pris au dépourvu et n’a pas vu venir la colère populaire, une pression sociale finalement payante.
Enfin le parti a fait preuve de résistance et de résilience face à une situation de crise.

La peur doit désormais changer de camp, et à Pastef de donner le tempo, de maintenir la pression et d’être exigeant en vue des joutes électorales à venir notamment en s’appuyant sur le mémorandum transmis avec les principaux points essentiels que je me permets de rappeler :

– La levée des chefs d’inculpation à l’endroit de son leader le président Ousmane Sonko.
– La révision et mise à disposition du fichier électoral
– La libération de tous détenus politiques
– L’ouverture d’une enquête pour toutes les personnes décédées lors des manifestation et l’indemnisation des victimes
– L’impossibilité constitutionnelle du président en exercice de postuler à un 3ème mandat
– La tenue rapide des élections municipales et les élections législatives pour 2022.
– Ne pas être juge et partie avec un ministre chargé de l’organisation des élections neutre et issu de la société civile, comme c’était le cas avec le Général Lamine Cissé en 2000 et aussi le cas avec Cheikh Gueye, ancien Directeur de la Direction Générale des Elections (DGE) sous la présidence de Abdou Diouf et ministre chargé de l’organisation des élections en 2012.

Résister ou disparaître, rien ne saurait définir exactement l’instinct de survie du parti Pastef et de son leader le président Ousmane Sonko.

Gagner cette bataille était une question de vie ou de mort pour le parti, d’éviter le même sort qu’a connu Mamadou Dia avec Senghor, au président Ousmane Sonko l’espoir de la jeunesse, l’espoir de tout un peuple.

Le Parti Pastef les patriotes est sorti grandi de cette épreuve et a su capitaliser sur un nouveau front de l’action politique se résumant à la résistance. Mais la guerre est loin d’être gagnée, en réalité elle ne fait que commençait et 2024 est encore loin et nous réserve bien des surprises.

Le projet politique du parti séduit, mais le projet politique du parti dérange. L’idée d’un parti politique révolutionnaire, antisystème est un projet bien ambitieux au Sénégal, quand on sait que le pouvoir depuis des décennies est aux mains de politiciens professionnels, des lobbies et affairistes qui ont la main mise sur les richesses du pays.

Des institutions instrumentalisées : Le parlement et la justice

Une des failles de notre système se trouve dans l’instrumentalisation de la justice à des fins politiques, donc la violation du principe de séparation des pouvoirs.

Le peuple sénégalais n’aime pas l’injustice même face à un président-roi qui concentre tous les pouvoirs entre ses mains : exécutif, législatif, judiciaire et même le 4ème pouvoir, la presse corrompue avec ses mercenaires est acquise à sa cause.

Le principe d’indépendance et d’une justice impartiale est bien plus que d’actualité dans cette affaire, et doit nous interpeller à bien des égards.

Une leçon et un signal fort, pour le parti Pastef dans son projet de prôner ainsi, pour un président qui ne serait pas chef de parti et un conseil supérieur de la magistrature détachée de la présidence, deux préalables pour la bonne marche de la démocratie et de l’indépendance de la justice.

Osons et espérons croire, mais travaillons et prions pour que le pouvoir ne soit pas une en fin en soi pour le parti Pastef et ses acteurs, mais un moyen de sortir le Sénégal de l’obscur et des ténèbres.

Hommage et prières à nos martyrs, ceux qui se sont sacrifiés pour la démocratie, pour la justice et pour une souveraineté nationale.

* Sénégal deukkou Jamm la : Le Sénégal est un pays de paix
* Médiocratie : La culture de la médiocrité
*Idiocratie : La culture de l’idiotie
*Méritocratie : La culture du mérite
*Goorgorlous : débrouillards
*Barça ou Barsakh: Barcelone pour faire référence à l’Europe ou barsakh en Wolof voulant dire la mort.

Matar TRAORE
Responsable commission CEPME dans MONCAP France

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