jeudi 28 mars 2024
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BAPTÊME POLITIQUE, par Serigne Saliou Guèye

𝐃𝐨𝐧𝐧𝐞𝐫 𝐥𝐞 𝐧𝐨𝐦 𝐝𝐞 𝐖𝐚𝐝𝐞 𝐚𝐮 𝐧𝐨𝐮𝐯𝐞𝐚𝐮 𝐬𝐭𝐚𝐝𝐞 𝐝𝐞 𝐃𝐢𝐚𝐦𝐧𝐢𝐚𝐝𝐢𝐨 𝐫𝐞𝐥𝐞̀𝐯𝐞 𝐝𝐚𝐯𝐚𝐧𝐭𝐚𝐠𝐞 𝐝’𝐮𝐧 𝐦𝐚𝐜𝐤𝐲𝐚𝐯𝐞́𝐥𝐢𝐬𝐦𝐞 𝐩𝐨𝐥𝐢𝐭𝐢𝐪𝐮𝐞 𝐪𝐮𝐞 𝐝’𝐮𝐧𝐞 𝐬𝐢𝐧𝐜𝐞́𝐫𝐢𝐭𝐞́ 𝐨𝐝𝐨𝐧𝐲𝐦𝐢𝐪𝐮𝐞. 𝐋’𝐞𝐬𝐬𝐞𝐧𝐭𝐢𝐞𝐥 𝐞𝐬𝐭 𝐝𝐞 𝐜𝐚𝐬𝐬𝐞𝐫 𝐬𝐲𝐦𝐛𝐨𝐥𝐢𝐪𝐮𝐞𝐦𝐞𝐧𝐭 𝐥𝐚 𝐝𝐲𝐧𝐚𝐦𝐢𝐪𝐮𝐞 𝐮𝐧𝐢𝐭𝐚𝐢𝐫𝐞 𝐘𝐚𝐰 𝐞𝐭 𝐖𝐚𝐥𝐥𝐮 𝐪𝐮𝐢 𝐩𝐨𝐢𝐧𝐭𝐞 𝐚̀ 𝐥’𝐡𝐨𝐫𝐢𝐳𝐨𝐧

Mardi 22 février 2022, c’est le jour de l’inauguration du nouveau complexe sportif ultra-moderne de Diamniadio d’une capacité de 50 000 places composé de deux autres stades omnisports d’appoint aux normes olympiques.

Le chef de l’Etat Macky Sall a donné au nouveau stade de Diamniadio le nom du président Abdoulaye Wade. Les Sénégalais, dans leur grande majorité, ont salué cette immortalisation du président Wade par le biais de ce bijou sportif aux standards internationaux. Si le Centre international de conférence de la nouvelle ville porte, depuis 2014, le nom du président Abdou Diouf, il était temps de corriger cette injustice odonymique à l’endroit du président Wade qui a été le mentor politique de Macky Sall même si la realpolitik a fini par les brouiller depuis avril 2013.

Mais si certains Sénégalais ont salué cette initiative de Macky Sall, d’autres y voient un simple calcul politicien dicté par les circonstances politique actuelles. D’ailleurs un journal comme Walf Quotidien, dans son édition du 21 février 22, parle de New-deal entre Macky et Wade. Les élections locales sont derrière nous mais elles sont très présentes, prégnantes et pesantes dans les choix politiques présents du président Macky Sall. Aujourd’hui Bennoo est sorti majoritaire avec les collectivités territoriales gagnées sur l’ensemble du pays mais avec les suffrages exprimés, la coalition présidentielle est minoritaire si l’on tient compte des voix engrangées par toutes les autres coalitions qui faisaient face à Bennoo. Le président Sall ne veut pas courir le risque d’une cohabitation politique entre lui et une majoritaire parlementaire issue de l’opposition.

Et si la dynamique électorale enclenchée depuis les locales se poursuit aux législatives, il est fort probable que l’Assemblée nationale, pour la première fois de son histoire politique, soit présidée par un opposant. Et l’expérience a montré qu’un président de la République qui gouverne sans majorité parlementaire n’inaugure que des chrysanthèmes. Il n’a aucun pouvoir de décision car le centre de gravité du pouvoir se déplace de la présidence à la Primature. Pour éviter cette éjection avant l’heure (février 2024), Macky joue son va-tout.

C’est pourquoi aujourd’hui, il s’échine à vouloir casser la dynamique unitaire qui se dessine entre Wallu et Yewi askan-wi (Yaw) depuis le lendemain des élections municipales et départementales. Macky comprend que l’agrégation des suffrages de Yaw (presque 800 000), de Wallu (plus de 400 000) et éventuellement de Gëm sa Bopp (à peu près 100 000) est synonyme d’une coexistence institutionnelle forcée entre lui l’opposition majoritaire.

Par conséquent, donner le nom d’Abdoulaye Wade au nouveau stade de Diamniadio relève plus d’un mackyavélisme politique que d’une sincérité odonymique. Cela lui ouvre le boulevard d’une compromission avec le PDS. Depuis 2012, Macky Sall a été le principal déstabilisateur du PDS. L’emprisonnement de Karim Wade, dès les premières années de gouvernance de Macky en sus celui d’autres militants, montre que la désaffection de l’actuel chef de l’Etat à l’égard de son prédécesseur est une réalité profonde. C’est pourquoi, les Sénégalais ont du mal à comprendre l’extase hypocrite de l’ancienne ministre de la Justice Aminata Touré à propos du nom du nouveau stade si l’on sait que c’est elle qui a été l’artisan principal de l’embastillement de Karim Wade.

Finalement, le code électoral avait été frauduleusement modifié et le leader du PDS n’avait pas pu se présenter à la présidentielle de 2019 parce qu’il n’était pas électeur et en plus il a perdu, d’après Aly Ngouille Ndiaye, alors ministre de l’Intérieur, ses droits civils et politiques. Ce qui relève du mensonge politique parce que la perte de ces droits, qui est une peine complémentaire, est assujettie au prononcé d’un juge. Ce qui n’a jamais été le cas. Même l’initiative opérée par Serigne Mountakha lors de l’inauguration de la mosquée de Massalikoul Jinane, le 27 septembre 2019, n’avait pas permis de rabibocher les positions des deux présidents antagonistes.

Depuis le 24 juin 2016, date à laquelle, Karim Wade a été gracié et expulsé nuitamment du pays en direction du Qatar, ce dernier n’a pas la latitude de retourner au bercail nonobstant les pseudo-tentatives. Ce baptême politique du stade de Diamniadio tombe au moment où des manœuvres politiciennes sont menées pour attribuer aux libéraux des maroquins dans le futur bric-à-brac gouvernemental qui sera mis en place. C’est un émollient qui permettra, selon Macky Sall, aux libéraux radicaux du PDS qui rechignent à tout entrisme dans un gouvernement de Macky Sall, d’assouplir leur rétivité. Et le PDS dans un gouvernement apériste le range dans la coalition présidentielle. Ce qui veut dire que bleus et marron-beige chemineront ensemble vers les élections législatives. Peu en chaut à Macky si les militants libéraux vont suivre leurs responsables politiques entristes ou pas, l’essentiel est de casser symboliquement la dynamique unitaire Yaw et Wallu qui pointe à l’horizon.

Une éventuelle entrée du PDS dans un gouvernement aura comme soubassement en dehors des maroquins et strapontins, « l’amnistie » de Karim Wade et sa participation à la présidentielle de 2024. En tout cas, tout laisse croire que le vent du dégel souffle entre Macky et Wade parce que ce dernier qui avait craché, depuis l’incarcération de son fils, sur toute proposition odonymique, semble aujourd’hui avoir assoupli et infléchi sa position. Normal, la politique est fille des conjectures et des conjonctures et au rythme des intérêts politiques des uns et des autres, la conjoncture des législatives détermine la conjecture de la présidentielle de 2024.

 

Avec Seneplus

 

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