Interview : Dieynaba Sar, Coordonnatrice de la Cellule PASTEF de Bordeaux (France)
Toute les cellules et coordinations du parti PASTEF Les Patriotes, au Sénégal et dans la Diaspora, sont appelées à renouveler leur instances, ceci dans l’objectif d’une meilleure organisation du parti à la suite de l’évaluation faite à l’issue des élections présidentielles de février 2019. Ci dessous l’interview pour JotnaNews de Dieynaba SAR qui vient d’être élue Coordonnatrice de la Cellule de Bordeaux en France.
Vous venez d’être élue Coordonnatrice de la Cellule PASTEF de Bordeaux. Quels sont vos projets au sein de la Section Nouvelle-Aquitaine et de la Coordination PASTEF France ?
Dieynaba SAR : J’aimerais avant tout rendre un vibrant hommage à la coordonnatrice sortante Marie-Rose Faye. C’est la politique qui nous a fait nous connaitre, mais elle est aujourd’hui devenue une amie et une collaboratrice estimée. Je veux également saluer le travail remarquable qu’elle a eu à mener ces dernières années. C’est l’occasion aussi de remercier tous les membres de l’équipe qui portent le projet de notre parti à Bordeaux et qui n’ont eu de cesse de soutenir notre président, Ousmane Sonko. Ces hommes et ces femmes de talents ont brillamment participé à la vulgarisation de notre projet de société pour le Sénégal, en Nouvelle-Aquitaine et partout ailleurs, résultant en la victoire écrasante d’Ousmane Sonko dans notre département, aux élections présidentielles de février 2019. Bien sûr, nous n’entendons pas nous arrêter en si bon chemin. Pour nous, le travail ne fait que commencer. Notre objectif est de renforcer notre influence dans la région et convaincre la majorité de nos compatriotes de la pertinente de notre projet politique. Nous sommes la seule alternative à la gouvernance désastreuse initiée par le président Sall, qui continue de mener notre pays à la catastrophe. Aujourd’hui, les sénégalais ont compris que le gouvernement actuel, comme tous ceux qui l’ont précédé depuis 2012, est, totalement incapable de régler les problèmes auxquels ils sont confrontés.
Historiquement, la diaspora a toujours joué un rôle important dans la politique nationale, servant de moteur pour les actions, les idées et les innovations. Nous sommes conscients du rôle important que la section Nouvelle-Aquitaine peut jouer au sein de la coordination PASTEF France. Parti de rien, nous sommes aujourd’hui la première force politique en Nouvelle-Aquitaine. Et ce n’est pas rien.
La politique paraît inaccessible ou ne pas intéresser beaucoup de nos compatriotes sénégalais. Comment avez-vous fait pour vous lancer ? Qu’est-ce qui vous a poussé à vous engager en politique ?
Dieynaba SAR : Je crois que ce qui pose réellement problème c’est l’inaccessibilité et la distance créée par une certaine réalité plutôt que le manque d’intérêt. Les sénégalais s’intéressent à la politique, elle prend une grande place dans le débat public. Je pense que cela a toujours été ainsi. Il suffit de revoir la ferveur populaire lors du premier discours de Léopold Sédar Senghor en tant que président de la République, le 6 septembre 1960, ou se remémorer la cérémonie de prestation de Wade en 2007. Je crois aussi, que de façon générale, les populations répondent présentes lors des grands scrutins électoraux. Pour moi, il y a plutôt un profond désamour entre les sénégalais et ceux qui les dirigent. Il existe une barrière tangible entre les administrés et la classe politique. Ce sentiment est de plus en plus exacerbé et cela s’explique notamment par l’incapacité de la classe politique à se réinventer, se renouveler. Il faut dire qu’il y a encore des personnes qui sont là depuis au moins 40 ans, dont la carrière s’est résumée à occuper des fonctions politiques, occuper tous les postes imaginés et imaginables, avec tous les honneurs dus. Pour ces personnes-là, il est légitime de se demander quelle est leur vrai apport aujourd’hui. Quelle est leur bilan ?
Il y a aussi le manque de conviction, de vision, de compétences, chez certains politiques dont on a l’impression qu’ils ont embrassé la fonction uniquement parce que c’était le moyen le plus facile de se réaliser au plan personnel. Bien sûr, je ne peux pas ne pas soulever le problème que constitue la corruption dans le milieu de la politique, avec l’enrichissement illicite à outrance de certains hommes politiques.
Tout cela peut expliquer le manque d’engagement ou la réticence que l’on note chez la nouvelle génération, éprise de justice sociale. A ceux-là je leur dis de s’engager pour changer l’ordre établi, car rien n’est immuable.
En ce qui me concerne, j’ai toujours été intéressée par la politique. J’ai très jeune été fascinée par la capacité d’un projet politique à changer la destinée d’un peuple. De la capacité d’un homme, d’une femme, à mener son peuple vers un destin meilleur. Il y a des sociétés qui en quelques décennies ont pu changer leur destin. Il y a le cas du Japon, de la Chine ou l’Inde, plus récemment et à une échelle plus comparable, il y a le Rwanda de Paul Kagamé qui semble avoir choisi la bonne voie même si tout n’est pas parfait. Pourquoi ne pouvons-nous pas y arriver ? Il faudra certainement beaucoup de courage, se défaire du patronage des puissances étrangères, bousculer les certitudes, repenser le « système » dans sa globalité. C’est parce que je crois que c’est possible, que je me suis engagée au Pastef. J’ai la conviction qu’Ousmane Sonko est l’homme qui peut incarner le changement tant espéré.
Vous sortez, avec le parti PASTEF, voilà maintenant près de 7 mois, d’une élection présidentielle intense à tout point de vue. Quel bilan personnel tirez-vous cette expérience ?
Dieynaba SAR : Cette élection présidentielle a été intense en tout point de vue avec un climat démocratique extrêmement tendu. Les enjeux étaient énormes et le scrutin a eu une résonnance toute particulière car le chemin parcouru n’a pas été facile. Rappelons-nous la révision du code électoral votée le 19 avril 2018 dans un hémicycle réfractaire au débat démocratique, par les députés de la majorité, enclins à voter (les yeux fermés) tout ce qui ferait plaisir au président de la république, malgré un climat de forte contestation populaire. Alors que Dakar et plusieurs autres villes du pays faisaient face à la colère de la rue, pendant que les coups et les bombes lacrymogènes pleuvaient sur les manifestants (et les journalistes), le président, Macky Sall, avait jugé opportun de se rendre à Paris pour rencontrer Emmanuel Macron. C’était tout un symbole !
Avec la loi imposant le système de parrainage (les candidats devant obtenir un parrainage de 0,8 % du corps électoral) introduite dans la loi électorale à seulement 10 mois de l’élection présidentielle, le pouvoir en place a cherché par tous les moyens à éliminer tous les obstacles à la réélection de Macky Sall. Voilà les méthodes de l’adversaire auquel nous avons dû faire face.
Sur un plan plus personnel, cette élection a été riche en enseignement. Elle nous a permis d’assoir notre parti dans la diaspora, mais aussi, au niveau national. Ce que les gens doivent savoir, c’est que nous n’avions pas les mêmes armes que nos adversaires. Nous n’avions pas l’appareil d’Etat avec nous, ni la manne financière des fonds politiques occultes. Nous avions le soutien indéfectible de nos militants et sympathisants. Notre campagne a été financée par ces personnes-là. C’est assez révolutionnaire ! Avec les moyens limités dont nous disposions et un projet politique bâti avec les sénégalais, pour résoudre les problèmes des sénégalais, pour une première participation, la Coalition SONKO Président a recueilli pas moins de 15,67 % des suffrages. Ce qui nous a placé derrière Macky Sall (58, 27%) et Idrissa Seck (20,50%). Nous pouvons être fiers de ce que nous avons accompli. Je crois que c’est un signal fort adressé à nos adversaires.
La place et le rôle de la Diaspora dans les organes dirigeants de PASTEF sont systématiquement évoqués dans les évaluations et les bilans faits à l’issue de la Campagne présidentielle. Qu’est ce qui pourrait être fait, selon vous, pour que le parti puisse répondre à cette attente ?
Dieynaba SAR : En 2016, la Direction Générale des Sénégalais de l’Extérieur avait recensé entre 2,5 et 3 millions de sénégalais établis à travers le monde. Ce que l’on nomme « la Diaspora » contribue, en moyenne, à hauteur de 950 milliards de Fcfa (1,45 milliards d’euros) par an, dans l’économie nationale. Il est important de rappeler ces chiffres pour savoir de quoi nous parlons.
Même si Macky Sall est arrivé en tête dans la diaspora, à la présidentielles de février 2019, les résultats remarquables obtenus par la Coalition Sonko Président nous renseignent à quel point cette « région », considérée à juste titre comme un département à part entière sur la carte électorale, peut jouer un grand rôle dans la construction de notre parti. Dans la diaspora, Ousmane Sonko a nettement devancé Idrissa Seck (20,71%), réalisant un important score (26, 90%). Avec ce score, nous avons amélioré de plus de dix points notre moyenne nationale.
La diaspora a toujours été d’un apport considérable en ce qui concerne les idées, les actions, les innovations politiques. De nombreuses actions qui ont contribué à renforcer le parti ont été initiées par les militants de la diaspora. Parmi les innovations les plus remarquables, la campagne BOKKNAA, vaste projet de financement participatif qui a fait ses preuves. Aujourd’hui, la diaspora est effectivement en attente d’une redéfinition de son rôle et sa place au sein de la grande maison PASTEF. Je pense que cette demande portée par nos militants est tout à fait légitime et je crois que le parti travaille à apporter une réponse adéquate aux attentes. On est en politique, alors il n’y pas de solutions miracles, mais des hommes et des femmes qui doivent se mettre à la recherche de solutions. Je pense que l’une des solutions est de travailler ensemble dans la sérénité pour repenser notre organisation globale, pour que la diaspora soit plus représentative au niveau des instances dirigeantes de notre parti, pour qu’elle puisse peser dans les décisions importantes, participer au débat national… C’est d’ailleurs l’un des chantiers auquel notre parti s’est attaqué au lendemain des élections présidentielles. Nous verrons ce qu’il en sortira mais nous restons optimistes.
Il est envisagé, pour les prochaines élections locales, législatives et présidentielles, la mise en place d’une Coalition JOTNA, mais aussi la fusion de PASTEF avec d’autres partis et mouvements au sein d’un même parti politique. Quelle appréciation faites-vous de ces initiatives ?
Dieynaba SAR : Nous sommes allés aux élections présidentielles de février 2019 avec une coalition, baptisée Coalition Sonko Président, avec à sa tête, Ousmane Sonko. Les partis et mouvements qui ont cru en notre projet, notre message, nous ont rejoint. Cette coalition ne s’est pas formée sur des petits arrangements, grandes promesses électorales, postes monnayées… La ligne du parti est assez claire : rassembler le plus large possible autour de notre projet pour le Sénégal. La Coalition Sonko Président a aujourd’hui cédé la place à la Coalition JOTNA. Dans cette nouvelle coalition qui est au début de sa construction, figurent des partis de l’ancienne coalition, mais également des nouveaux venus. Je crois que c’est une bonne initiative. Notre objectif n’est pas de régner à tout prix, mais de prendre le pouvoir, afin d’’impulser les racines du changement au Sénégal. Dans cette entreprise qui ne sera pas facile (car nous savons à quoi nous devrons faire face), nous aurons besoin de tous les sénégalais qui se reconnaissent dans notre message : bâtir un Sénégal pour tous. Face à la loi du plus fort, nous devons apporter la force de conviction du plus grand nombre.
Je crois, aujourd’hui, à quelques mois du nouveau mandat de Macky Sall, avec la libération de Khalifa Sall et l’annonce de la venue prochaine de Karim Wade, l’échiquier politique est dans une période de grande incertitude, de reconstruction. C’est le moment pour nous et nos alliés de nous rassembler autour d’un projet fort, face au risque de voir la majorité imposer son agenda, ses règles. Tout cela pour dire que la Coalition JOTNA est une coalition d’idées, de projet… et non pas un regroupement de mouvements ou partis politiques autoproclamés, pour certains, depuis longtemps « fossilisés », mus par le seul désir de participer au banquet politique auquel les invite le pouvoir. En ce qui nous concerne, nous avons un autre dessein pour le Sénégal.
Quels projets avez-vous pour les femmes, et plus particulièrement les JIGUENI PASTEF maintenant que vous êtes un peu une de leur porte-parole ?
Dieynaba SAR : Je ne sais si je suis considérée comme une de leur porte-parole, mais je sais que les femmes sénégalaises sont des femmes remarquables. Elles ont toujours participé à la vie politique du pays, même si l’histoire ne leur fait pas souvent honneur. Le mouvement JIGUENI PASTEF, coordonné au niveau national par Maimouna Dieye, a plusieurs ramifications à travers le monde. Le projet des femmes du PASTEF est porté par des femmes remarquables qui se battent dans un monde où il leur faut souvent taper sur la table pour se faire entendre. C’est de notoriété publique que la politique est un monde d’hommes, et si cela est vrai partout ailleurs, c’est encore plus vrai dans le monde de la politique sénégalaise. Ici en France, les femmes ont été de toutes les batailles, manifestations contre les abus du pouvoir, recherche de parrainage, massification du parti… Elles ont également été aux commandes lors de la venue d’Ousmane Sonko, à Paris, en novembre 2018, où il a tenu une conférence à Sciences Po et un grand meeting qui fait encore date. C’est juste pour dire que les femmes sont de toutes les batailles. Seulement, il faut aussi reconnaitre qu’il existe un schéma classique qui tend à confiner les femmes dans les partis politiques, à des rôles annexes ou prédéfinis. Je pense que c’est aux femmes qui se lancent en politique aujourd’hui de se prendre en main pour impulser une nouvelle dynamique, de nouvelles formes de représentations. Il s’agit également pour les femmes d’inventer une nouvelle façon de faire de la politique, se fédérer, promouvoir des personnalités fortes, pour peser dans le débat politique de façon large. Je pense que si nous arrivons à cela, de nouvelles vocations seront suscitées.
La parité n’est respectée que là où le mode de scrutin l’exige (à l’Assemblée Nationale). Elle ne s’impose que rarement (au Gouvernement). Quel est votre avis sur la discrimination positive, notamment en politique ? Est-elle envisageable au Sénégal et dans quelles conditions ?
Dieynaba SAR : Oui, il faut se reconnaitre que la loi sur la parité, votée en 2010 sous la présidence d’Abdoulaye Wade, avait pour principal objectif de favoriser une plus grande visibilité des femmes en politique. Il s’agissait également de promouvoir les femmes et redéfinir leur représentation, là, où s’exerce la représentation nationale, l’Assemblée nationale. En matière de parité, en ce qui concerne les gouvernements successifs depuis que Macky Sall est à la tête du Sénégal (25 mars 2012), les sénégalais ont vite pu se rendre compte que les effets d’annonce avaient pour seul objectif de tromper l’opinion publique. Aujourd’hui, on est loin de la promesse d’un président, qui, face à l’urgence sociale, avait prévu un gouvernement réduit à 25 membres, avec la part belle aux femmes. Depuis, l’homme nous a habitué à faire des promesses qu’il ne compte pas tenir. Le nouveau gouvernement de Macky Sall (avril 2019) n’a pas opéré une révolution en ce qui concerne la parité. La « photo de famille » officielle est assez édifiante. Seulement huit femmes ont été nommées dans le gouvernement, contre 24 hommes, avec aucune de ces femmes à la tête d’un ministère régalien. Ceci a conduit l’historienne Penda Mbow, ancienne ministre de la Culture d’Abdoulaye Wade, à qualifier ces nominations de « confidentielles », faisant référence aux portefeuilles non-régaliens dont disposent les femmes ministres – ce qui dans la réalité les fait passer « à côté du véritable pouvoir ». Pour ce qui est de la discrimination positive en politique, en faveur des femmes, je crois qu’elle peut avoir ses avantages lorsque les solutions sont épuisées, lorsqu’il s’agit de promouvoir de nouveaux talents… Toutefois, cela suppose d’être dans une démocratie mûre, avec des femmes qui s’investissent en grand nombre, et de façon qualitative, en politique. Au Sénégal, il faut reconnaitre qu’on en est encore loin de ce cas de figure, même si le pays a déjà connu deux premières ministres, Mame Madior Boye et Aminata Touré.
Selon vous, serait-il possible à l’heure actuelle qu’une femme puisse s’imposer au Sénégal et accéder à la Présidence de la République ?
Dieynaba SAR : Oui, contrairement à ceux qui disent que ce n’est pas possible, je pense qu’une femme pourrait tout à fait s’imposer et accéder à la Présidence de la République au Sénégal, peut-être pas à l’heure actuelle, mais dans un avenir proche. La société sénégalaise a beaucoup évolué ses dernières années et je crois que le pays a aussi beaucoup changé. Les femmes accèdent aujourd’hui à des postes de responsabilités dans tous les domaines. Elles sont de plus en plus jeunes et de plus en plus nombreuses à prendre leur destin en main. A l’instar de l’influente jeune directrice de la Sédima, Anta Babacar Ngom, les femmes sénégalaises participent de plus en plus à la vie économique de la nation. De surcroit, celles qui ont de grandes responsabilités au niveau internationale, sont souvent citées pour leur brillantes performances. Même si la politique demeure largement la chasse gardée des hommes au Sénégal, je reste optimiste, car je suis persuadée que les femmes seront de plus en plus nombreuses à s’engager au plus haut niveau.
Pour moi, il y a aujourd’hui au sein de la mouvance présidentielle une femme à surveiller de près, Aminata « Mimi » Touré. L’ex-ministre de la Justice et ancienne chef du gouvernement, proche du président Macky Sall, devenue aujourd’hui la présidente du Haut Conseil économique social et environnemental (ce qui lui confère le statut de « troisième personnage de l’État »), ne cache pas ses ambitions.
Vous avez initié avec d’autres Sénégalais une pétition contre l’annonce de la fermeture du Consulat du Sénégal à Bordeaux dans le cadre de la réduction du train de vie de l’Etat. Quelles étaient les motivations et qu’en est-il de cette fermeture programmée ?
Dieynaba SAR : ce qui s’est passé à Bordeaux est complètement sidérant. La manière dont nos compatriotes ont été traités par les autorités est inadmissible et témoigne des rapports que le gouvernement entretient avec ses administrés. Ce qu’il faut préciser, c’est que l’annonce de la fermeture du Consulat du Sénégal a été annoncée à nos compatriotes par la presse. Constitués en collectifs regroupant différentes sensibilités, nous nous sommes tournés vers le consul pour être fixé. Mais ce dernier n’a pas été en mesure d’apporter des éclaircissements dans cette affaire, ce qui a jeté au sein de la communauté un climat d’insécurité et une grande période de stress. Ce que je veux dire, c’est que nos compatriotes se sont sentis victimes des représailles des autorités, dont la rumeur disait que la fermeture du Consulat du Sénégal à Bordeaux était due à la cinglante défaite de Macky Sall, à la présidentielle de février 2019, Ousmane Sonko remportant haut la main tous les bureaux de vote en Nouvelle-Aquitaine. L’Etat du Sénégal a annoncé cette mesure comme rentrant dans le cadre de la réduction du train de vie de l’Etat. Ce que je réponds à cela est simple : c’est de l’enfumage ! Il y a bien d’autres moyens d’y parvenir. Commençons d’abord par récupérer tout l’argent public présumé détourné par les tenants du pouvoir, ou supprimer la multitude d’agences étatiques nationales budgétivores, qui ne servent qu’à caser de la clientèle politique. De plus, nous pensons que fermer le consulat de Bordeaux est une erreur au vu des relations historiques qui lient la ville de Bordeaux au Sénégal. Une pétition a été initiée pour protester contre la fermeture du Consulat, mais ce qui demeure certain, aujourd’hui, c’est que l’Etat ne semble pas avoir l’intention de reculer. Dans cette affaire, nos compatriotes sont laissés dans un état de dénuement total.
Quels commentaires pouvez-vous faire sur le point d’actualité au Sénégal concernant les inondations, les constructions anarchiques dans la banlieue et le manque d’infrastructures d’assainissement et surtout quels liens faites-vous avec les politiques publiques telles que menées aujourd’hui au Sénégal ?
Dieynaba SAR : Après 7 ans de règne sans partage de Macky Sall, il a fallu les premières eaux de pluies, pour que Dakar, ville caractérisée par le manque d’infrastructures d’assainissement, soit de nouveau submergée d’eau. Voilà où nous en sommes ! Des pans entiers de quartiers à Dakar et dans les régions sont entourés d’eau, les routes impraticables, les maisons inondées, les populations exposées à de graves risques sanitaires… Les images qui montrent les conditions de vie difficiles de nos compatriotes les plus démunies, sont justes insoutenables. Les femmes et les mères de famille sont les plus vulnérables. Pendant ce temps-là, le président s’est illustré dans la construction d’un train express régional, qui a coûté, dans la première partie de la construction, la mirobolante somme de 656 milliards de francs FCA (environ un milliard d’euros). Faut-il rappeler que le Sénégal figure dans le triste classement des 25 pays les plus pauvres du monde, selon les chiffres de la Banque mondiale. Ce TER semble être frappé d’immobilisme, neuf mois après l’inauguration forcée dont nous a gratifié le candidat Macky Sall, à près d’un mois de la présidentielle. Ce qui est vrai, c’est que les gouvernements successifs se sont montrés totalement incapables à résoudre le problème des inondations récurrentes. Les populations en ont marre des promesses non-tenues des pouvoirs publics, qui, année après année, les laissent face à leur désarroi. Pire, comment concevoir que le nouveau gouvernement, en août dernier, à seulement 4 mois de sa formation, ait pris en catimini la décision de suspendre les réunions du Conseil des ministres pour une durée d’un mois ? Un gouvernement sitôt formé sitôt parti en vacances, en dépit de l’urgence sociale ! Comment ont-ils pu aller en vacances au moment où les paysans vivaient de grandes incertitudes par rapport à la campagne agricole ? Ce sont des questions essentielles que doivent se poser les sénégalais.
Pour finir, comment envisagez-vous votre avenir en politique ?
Dieynaba SAR : Je pense que lorsque l’on s’engage en politique, on fait un choix important. Ce n’est pas rien et ce n’est pas facile tous les jours. Mais quand on sait pourquoi l’on s’engage, alors le chemin devient plus facile. Il est difficile de parler d’avenir politique à titre personnel, mais ce que je peux dire, c’est que le PASTEF suscite aujourd’hui beaucoup d’espoir et cet espoir ne peut être déçu. Nous avons le devoir de faire notre possible pour réussir et je pense que nous sommes nombreux à être imprégnés de ce sentiment fort. Aujourd’hui, les sénégalais sont de plus en plus conscients que ceux qui les dirigent ne leur disent pas la vérité. Il y a une nouvelle génération qui aspire au changement, qui a soif de justice sociale, qui veut croire en son avenir, qui ne veut plus avoir à choisir entre une vie difficile et l’exode vers l’Europe. À ces jeunes-là, nous devons apporter des réponses, offrir un avenir meilleur. C’est parce que nous croyons que c’est possible, que nous nous battons.
Merci beaucoup.
Propos recueillis par Abdou SONKO, JotnaNews