Comment une cause se popularise-t-elle? (Par Amadou Sow)
Un combat, quelle que soit sa dimension, peut atteindre les masses et devenir national voire international en un temps imprévisible.
C’est comme un incendie qui peut être déclenché par une brindille et devenir des flammes qui ravagent tout sur leur passage.
L’arrivée à temps des sapeurs-pompiers peut contribuer à limiter les dégâts mais n’en est pas forcément une garantie pour stopper la propagation du feu.
À plusieurs reprises, la question de l’adhésion du peuple (de la masse silencieuse et neutre) au combat contre les injustices et pour la préservation des acquis démocratiques, est revenue dans mes échanges avec des personnes connues ou rencontrées de manière fortuite, au cours d’une activité commune.
L’un de mes interlocuteurs considère que le peuple sénégalais est en ce moment insensible à ces types de combat.
À chaque fois, ma position reste identique.
« Le peuple répondra lorsqu’il se sentira concerné ».
Évidemment, le peuple, comme la foule, ne réfléchit pas.
Cela ne veut nullement dire que les personnes qui le composent sont dénuées de raison et de discernement.
Dans le peuple, il y a même des génies et des leaders.
Les leaders peuvent servir de locomotive, s’ils parviennent à tirer la bonne ficelle.
Dans tous les cas, il ne faut pas attendre l’adhésion populaire pour commencer.
Il faut s’y mettre, tant qu’on demeure convaincu de lutter pour la bonne cause, de ne pas essayer de fourvoyer le peuple.
Celui qui essaie de le faire, sera un jour démasqué.
S’il y a une chose qui mérite d’être craint, c’est la furie d’un peuple qui se sent trahi.
Un État qui procède à des arrestations tous azimuts, pour une raison valable ou non, n’est pas à l’abri de la furie populaire.
À force d’arrêter, on finit par tomber sur « un » qui servira de catalyseur, d’élément déclencheur.
Le président de la république, lors de son entretien avec une partie de la presse nationale, a commis l’erreur monumentale de dire une réalité qui devrait être considérée comme un secret d’État.
En disant carrément que dans ce pays, certains sont intouchables (ce qui est relativement vrai), il ouvre la boîte de Pandore.
Une telle révélation d’un secret de polichinelle, pour ceux qui savent comment cela marche, est de nature à entraîner des conséquences que je me garderais de développer.
Les enseignants ne sont pas des personnes qui acceptent d’être les dindons de la farce.
Ils ne sont pas du genre à se laisser faire.
Un des leurs a été (d’après les informations) arrêté en plein cours.
Une telle pratique ne saurait se justifier dans un pays normal.
C’est une atteinte à la sûreté de l’éducation car un enseignant humilié devant ses élèves, c’est tout un mythe qui s’effondre.
Or, dans certains métiers, il est toujours bon de garder une dose de mythe.
Sans cette part de mythe, la relation pédagogique est presque annihilée, improductive.
L’arrestation de Dame Mbodj risque d’être la goutte d’eau de trop.
Déjà, le CUSEMS entre dans l’enceinte de l’arène et commence ses « bakk ».
Quand c’est Abdoulaye Ndoye qui annonce les couleurs, il y a de quoi s’attendre à une semaine mouvementée dans nos établissements scolaires.
Ce n’est pas par rapport à la capacité de mobilisation d’Abdoulaye Ndoye qui est incontestable.
Ceux qui connaissent l’histoire du CUSEMS, version Dame Mbodj, savent ce à quoi je fais allusion.
Je rappelle que le CUSEMS avait soutenu Youssou Touré, en pleine période de divergence avec ce syndicaliste qui, à l’époque, contestait les acquis des enseignants du Moyen-secondaire.
En tant qu’un des responsables de ce syndicat au lycée de Mboro, j’étais très affecté par sa radiation de la fonction publique.
De façon unanime, il a été soutenu par quasiment tous les syndicats d’enseignants.
Ce qui s’annonce avec l’arrestation de Dame Mbodj n’est pas loin de cette situation.
On ne touche pas aux enseignants.
À bon entendeur…à plus.
Amadou Sow
MONCAP
EP