Aide alimentaire: encore des failles même dans vos propres calculs.
Continuez à manipuler les chiffres, au moins vous les transformerez en fantômes fertiliseurs de consciences arides. Cherchez à réaliser des économies dans vos rêves de somnambules ou par une volonté de camouflage, le réveil sera brutal. En voulant tirer « le dauphin mort-né » de sa noyade, le Commissariat à la Sécurité alimentaire (CSA) a davantage aggravé sa situation. Gardez votre sérénité pour réussir ne serait-ce qu’un bon calcul. Apparemment, faire un bilan n’est pas un exercice facile pour tout le monde, surtout pour ceux qui sont foncièrement réfractaires à la transparence.
Nous resterons sur vos chiffres, rien que sur vos chiffres ! Il faut certes avouer que cela exige de l’endurance pour suivre correctement votre gymnastique dont l’invraisemblance choque les esprits alertes. En indiquant que l’acquisition des denrées alimentaires a coûté 57.289.289.292 F CFA, vous confirmez le DAGE du Ministère du Développement communautaire. En cela, vous posez une contradiction sèche, puisque la somme des 54.532.712.000 F CFA pour le million (1.000.000) de ménages initiaux plus les 5.453.271.200 F FCFA pour les 100.000 ménages supplémentaires, donne un montant global de 59.985.983.200 F CFA représentant l’achat total des denrées alimentaires. Finalement, qui croire ? DAGE ou le CSA ? Une incohérence de plus après celle liée aux soldes des deux ministères (des finances et du développement communautaire) relatifs au Programme de Résilience Economique et Sociale.
Par ailleurs, vous osez dire « qu’à ce jour le montant global de toutes les dépenses effectuées dans le cadre de l’aide alimentaire s’élève à 60.709.694.520 FCFA ». Rien que le coût des denrées alimentaires (59.985.983.200 F CFA) plus celui du transport (1.599.595.586 FCFA) font 61.585.578.786 F CFA. Au lendemain de votre cirque de presse, le journal Kritik’ du 22 juillet 2020 titrait à sa une : Mansour FAYE « économise » 8 200 000 000 F CFA. Alors qu’en prenant vos chiffres, rien que vos chiffres, le montant théoriquement économisé serait de 7 414 421 214 F CFA. Soit ce sont des lacunes manifestes, soit il s’agit d’une volonté cynique de manipulation des chiffres. Alors à quel niveau sont comptabilisés les éléments suivants :
– « les 820.809.642 FCFA, concernant le paiement des 5.000 vérificateurs, l’impression des bons matières et des bons d’enlèvement, les frais de communication, l’appui aux comités de ciblage dans les 14 régions du pays etc. »
– le 1.000.000.000 F CFA pour les oignons et les pommes de terre.
Sur le transport, dont les coûts sont élastiques non stabilisés, le DAGE rassure le Ministre qu’il ne dépassera pas deux (02) milliards, le CSA sort du bois pour hausser le seuil à 2,5 milliards représentant le montant des livraisons de denrées et des services de transport effectués et non encore facturés ; ce qui a comme conséquence un ajustement à la baisse de votre tartuferie d’excédent théorique. En effet, en tenant compte du paiement des vérificateurs ainsi que de l’acquisition d’oignons et de pommes de terre, le solde indique 5 593 611 572 F CFA (compte non tenu des 2 500 000 000 F CFA).
Sur le point précis relatif à l’acquisition d’oignons et de pommes de terre pour appuyer la commercialisation de la production locale à travers une convention avec la Délégation à l’Entreprenariat Rapide (DER), la symbolique des chiffres renseigne, encore une fois, sur la place que vous accordez aux dynamiques de développement endogène. Les potentielles pertes post-récolte des producteurs auraient constitué un alibi valide pour la ligne budgétaire de 1.000.000.000 F CFA pour 1.100.000 ménages (en moyenne 909.09 FCFA en oignons et pommes de terre par ménage, voyez-vous) si la structure économique dont vous avez hérité n’avait pas été davantage extravertie par vos politiques publiques. Nos braves producteurs méritent mieux que cela et, au-delà du conjoncturel, devraient être au centre de votre projet de TRANSFORMATION post-Covid 19, si tant est que vous en ayez un.
Au moins, notre interpellation a le mérite de vous débusquer de vos cachettes sur le prix unitaire du kit alimentaire. De 66 000 F CFA, le kit est ramené à 54.532,712 FCFA. Pourquoi n’aviez-vous pas communiqué le montant lors de votre déjeuner de presse ? Ce prix unitaire revu à la baisse ne sera jamais votre bouclier pour une efficacité encore moins une efficience, au contraire, il sera votre souffre-douleur. C’est ubuesque! Par un miracle on a un prix unitaire identique pour les 32 opérateurs retenus, qui n’avaient pas la même commande. Le ver reste encore dans le fruit du prix unitaire du kit alimentaire ! Le pauvre ‘’goorgoorlu’’ sénégalais est un homo œconomicus qui cherche difficilement à maximiser son utilité, alors pourquoi lui priver de ses 11 467 F CFA ?
L’aide alimentaire n’a pas encore révélé tous ses secrets, il faudra davantage secouer les sacs de riz pour en extirper « les corps étrangers ». Les fausses économies dont se targuent le CSA et le Ministère du développement communautaire, de l’équité sociale et territoriale ne sont qu’un leurre. C’est d’ailleurs ridicule d’essayer de faire des économies sur une aide sociale qui n’est ni un budget d’investissement encore moins un budget de fonctionnement. Finalement, la décision de faire passer le budget de 50 à 69 milliards sur la demande du président Ousmane SONKO n’aura aucun sens. Cette situation prouve encore l’impertinence du choix de la distribution de denrées à la place d’un transfert d’argent, qui aurait permis d’éviter des charges supplémentaires. Les économies réalisées sur le transport, la communication, la prise en charge des 5000 vérificateurs et autres frais auraient permis de relever le montant octroyé à chaque famille. L’autre avantage du transfert d’argent, aurait été de faire bénéficier aux commerçants locaux d’un relèvement du pouvoir d’achat des populations au lieu d’enrichir des caciques du pouvoir.
Le CSA vient au secours du Ministère du développement communautaire totalement désarmé pendant que ses bureaux sont en flammes. Nous vous demandons solennellement de ne plus mettre côte à côte ces deux mots : bonne et gouvernance. Le CSA vient d’être épinglé par l’Inspection générale d’Etat, dans son rapport de 2017 (page 107), sur la gestion douteuse de sa caisse d’avance. Des comptes bancaires sont ouverts de manière irrégulière et tenus sans journal pour les opérations de trésorerie, sans rapprochement bancaire, pour un montant de 1.200.000.000 F CFA. Rappelez-vous l’histoire récente de la caisse d’avance de la ville de Dakar traitée par la justice sénégalaise avec une célérité jamais égalée. Au lieu de jouer au pompier pyromane, assurez-vous au moins de faire le travail pour lequel vous êtes payé, c’est-à-dire assurer la sécurité alimentaire. Or le même rapport de l’IGE de 2017 (page 91) constate :
– l’inexistence d’un stock national de sécurité, malgré les allocations budgétaires annuelles pour sa reconstitution, qui sont passées de 1 000 000 000 F CFA à 1 200 000 000 F CFA
– la distribution inappropriée des stocks de riz à des acteurs qui ne sont pas dans une situation de vulnérabilité, au détriment des populations défavorisées.
Par conséquent, nous restons vigilants face au sort qui sera réservé à ce dossier lugubre du CSA.
Mouvement National des Cadres de PASTEF
MONCAP