vendredi 19 avril 2024
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Fin de règne

Nous avons bien raison d’être profondément peinés et sensiblement indignés par ce qui s’est passé dans la journée du 17 juin 2022, marquée par son lot d’arrestations abusives, de blessés graves et de manifestants abattus froidement par une police aux commandes d’un apprenti tyran . Ce qui ne devait être qu’une simple formalité citoyenne, garantie par notre constitution, s’est, hélas, transformé encore en une effusion de sang et de désolation des familles.

Par leur incurable lâcheté, Macky Sall et son ministre de l’intérieur, Antoine Diome, ont encore recouru à l’intimidation et à la violence sur leur peuple pour empêcher l’exercice d’un droit inaliénable. Et comme toujours, depuis l’arrivée de son ennemi juré sur la scène politique, le sud du pays a encore payé le plus lourd tribut de cette folie meurtrière que rien ne justifie si ce n’est de la provocation délibérée et de la méchanceté gratuite envers cette partie de la population sénégalaise.

La question peut être tournée dans tous les sens, mais aucun esprit objectif, imbu de justice, ne peut comprendre qu’un simple besoin d’une expression démocratique, à travers la tentative d’organisation d’un rassemblement pacifique, puisse virer au drame et entraîner des morts. Comment est-ce encore possible dans un pays qui s’est si négativement exposé à la face du monde lors des tragiques événements de mars de 2021? C’est parce que le président de la République et sa clique de subordonnés ont fait le choix d’une gouvernance tyrannique se réfugiant lâchement derrière la force étatique pour se maintenir au pouvoir.

Une semaine plus tôt, cette jeunesse envers laquelle Macky Sall a donné l’ordre d’ouvrir le feu, a pourtant démontré qu’elle peut exprimer sa frustration et son mécontentement avec retenue, grandeur et même… dans la joie. Refusant de se morfondre dans la résignation après avoir constaté le profond mépris que nourrit le président élu à son endroit, elle a consciencieusement décidé de se tourner vers l’avenir et de lier son destin avec celui d’Ousmane Sonko, porteur d’espoir et de rêves de possibilités. Plutôt que d’analyser lucidement les causes de ce divorce avec ce peuple qui l’avait démocratiquement élu en 2012, Macky Sall a choisi de le réduire en silence par un acharnement bien mûri et un terrorisme particulièrement insidieux.

Son arsenal de répression est certes impressionnant et les tentatives d’étouffement de toute voix contestataire sont assez claires, mais son projet funeste d’assujettir ultimement les Sénégalais est voué à l’échec. Il oublie peut-être qu’au plus fort règne du parti unique de Senghor des années 60 et de concentration de tous les pouvoirs entre ses mains, des voix dissidentes, au risque de leur vie, se faisaient tout de même entendre. Qu’il rouvre les pages de l’histoire sociopolitique du Sénégalais pour comprendre que le sang refus de la domination, d’où qu’elle puisse provenir, a toujours coulé dans les veines des Sénégalais. Le chemin de la liberté a été historiquement balisé par d’autres et il ne se refermera jamais. Il peut connaître de longues voies de contournement et des bifurcations sinueuses, mais il ne se refermera plus jamais. Et ce souffle de la démocratie qui a mené Macky Sall au palais présidentiel, quoique tumultueux dans son histoire, s’est acquise de très haute lutte. Ce n’est pas aujourd’hui, après avoir assuré douloureusement la survenance de trois alternances politiques, que Macky peut réussir à imposer aux Sénégalais ses désirs despotiques. C’est peine perdue et l’avenir nous édifiera qui de lui ou du peuple aura le dernier mot.

Lamine Niang

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